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Délégation aux droits
des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Créée par la loi n°99-585 du 12 juillet 1999, au sein de chacune des deux assemblées du Parlement. Elle a pour mission d’informer les assemblées de la politique du gouvernement en matière de droits des femmes et d’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Elle doit également assurer le suivi des lois qui concernent son champ de compétence. Elle est chargée de l’audition des experts ou témoins dans les sujets qu’elle doit traiter, et de la rédaction de rapports d’information. Elle peut également être saisie sur un projet ou une proposition de loi, auquel cas elle devra rendre un rapport comportant des recommandations rendues publiques. La délégation est actuellement dirigée par Mme Marie-Pierre Rixain, députée LREM de la 4ème circonscription de l’Essonne.

 

Liens avec les féminicides

 

La délégation rend un rapport d’information « sur la reconnaissance du terme de "féminicide" » dont la députée Fiona Lazaar est la rapporteuse. La résolution proposée par le dit rapport est adoptée par la délégation le 18 février 2020 : « (…) Considère que le terme de "féminicide" désigne les meurtres de femmes en raison de leur sexe, en particulier lorsque ceux-ci sont commis par le partenaire intime ou ex-partenaire intime ; Souhaite que l’emploi du terme de "féminicide" soit encouragé en France afin de reconnaître le caractère spécifique et systémique de ces crimes et ainsi de mieux nommer ces réalités intolérables pour mieux y mettre un terme. »

 

Positionnement

 

S’oppose à l’inscription du féminicide dans le Code pénal mais incite à l’utilisation du terme dans le débat public et dans la formation des professionnels amenés à être en contact avec des victimes de violences conjugales. 

 

Arguments utilisés

 

Contre l’inscription du féminicide dans le Code pénal :

  • Le terme recouvre trop de définitions différentes : le droit nécessite une précision parfaite et une compréhension partagée par tous.

  • Le risque de faire des femmes les « victimes des hommes » jusque dans le droit.

  • Contredit le principe constitutionnel d’égalité de tous devant la loi. 

  • Une infraction difficile à qualifier, ce qui risque de fragiliser la défense des femmes dans les tribunaux.

  • Le mobile est indifférent en droit pénal.

  • Des dispositifs existants suffisants (circonstance aggravante du meurtre sur conjoint/meurtre sexiste).

 

Pour l’utilisation du terme dans le débat public :

  • « Mieux nommer pour mieux connaître » : reconnaître le caractère systémique du phénomène et ses spécificités.

  • Mieux former les professionnels : les juges doivent comprendre « le fait que les violences conjugales et a fortiori les féminicides constituent un usage de la violence comme outil de répression pour le maintien de la domination masculine au sein d’un couple » (Nicole Belloubet).

 

Ressources : avis sur les violences conjugales

 

Dans un des comptes rendus, le juge des enfants au tribunal de grande instance de Bobigny et co-président de la commission « Violences de genre » du HCEfh, Edouard Durand, fait part de son avis. Proche d’Ernestine Ronai, mais aussi de Victoria Vanneau et Valérie Boyer, il lui paraît absolument fondamental de penser les violences conjugales comme une forme de violence sexuée. Par ailleurs, « violences conjugales » « décrit le réel et convient tout à fait ; mais avec le mot de “féminicide”, nous (parlons) plus précisément de la mort dans le couple ».

 

Ses arguments : 

  • penser les violences conjugales comme une forme de violence sexuée permet de « comprendre la violence et ses mécanismes », ce qui est « le seul moyen de protéger toutes les victimes de violences conjugales, quel que soit leur sexe ou quelle que soit la configuration, homosexuelle ou hétérosexuelle, de leur couple ».

  • « Tous les dispositifs de protection qui ont été créés l’ont d’ailleurs été par des professionnels (...) qui ont pensé les violences conjugales comme une forme de violence sexuée. »

  • « (Pour) l’homme et pour la femme, l’expérience de la victimation est très différente. Pour un homme, le risque de subir des violences se situe dans l’espace public, des violences commises par un autre homme inconnu de lui. Pour une femme, le risque majeur de subir des violences se situe dans l’espace privé, des violences commises par un homme connu d’elle. » A cela s’ajoute pour lui le rapport qu’entretient la société avec la parole des victimes, entre manque d’écoute et manque de confiance, de crédit.

 

Valérie Boyer, Vice-présidente de la Délégation, députée LR et cadre du secteur de la santé, se rapproche de Victoria Vanneau lorsqu’elle dit que rattacher le mot « féminicide » à la notion de violences conjugales est gênant. Par ailleurs, elle regrette que l’emprise ne soit pas définie dans notre droit. Pour elle, il faut conserver le terme « violences conjugales ».

Ses arguments sont :

  • la compréhension : tout le monde comprend les termes « conjuguicide », « violences conjugales » ou « violences domestiques ». De plus le mot « conjugal » veut dire que les violences se passent dans le foyer, dans la sphère familiale, même si cela concerne une grande majorité de femmes.

  • La particularité des violences conjugales, qui se distingue de l’homicide.

  • Ce n’est pas un terme d’exclusion : les violences conjugales arrivent dans des couples homosexuels qui « sont complètement exclus du dispositif » avec le terme « féminicide », alors qu’il y a « à peu près une trentaine d’hommes qui meurent sous les coups de leur conjoint ou conjointe violent » chaque année. V. Boyer se dit donc plutôt en faveur de l’emploi de « violences conjugales » « parce (qu’elle) pense que ce sont toutes les familles qui sont concernées » et que « c’est un rapport de domination et d’appartenance, (...) où la personne qui est féminisée est dominée ». Elle reconnaît ainsi le caractère sexué du phénomène, mais le place comme indépendant du sexe biologique de la victime. 

  • Le risque que « féminicide » soit un terme « déresponsabilisant » impliquant que « c’est la société qui tue la femme et que le mari n’est pas forcément responsable ou qu’il est le produit de la société. Ce n’est pas le cas dans le cadre de violences conjugales ».

  • Le contexte de théorisation du féminicide : V. Boyer reprend l’argument de Victoria Vanneau qui rappelle que le terme « féminicide » a été créé par rapport aux meurtres de masse de femmes au Mexique, soit un contexte bien différent du nôtre.

«  Toutes les victimes nous disent avoir fait appel à la société et la société ne les a pas crues. Permettez-moi, mesdames les députées ... de vous demander de créer un droit plus volontariste encore et de doter les institutions des moyens permettant de contrôler que les agents de l’État mettent en œuvre de façon effective cette législation. »

Le juge Edouard Durand

«   Le fait que cela se passe à la maison, c’est la circonstance aggravante parce que le foyer doit être le lieu de la protection. Ce n’est pas comme un accident extérieur. »

Valérie Boyer

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